Mes premiers souvenirs sont tous liés à cette loge de concierge du 15ème arrondissement. J’avais près de 20 ans quand nous sommes partis, et je n’ai que des bons souvenirs de cette période. La taille ou le confort du logement, je n’y pensais pas vraiment. On était heureux. Ma mère avait quitté son emploi pour devenir concierge, et ainsi passer plus de temps avec moi. Ce qui lui plaisait c’était le contact avec les gens de l’immeuble. Même en dehors de ses heures de services, sa porte était toujours ouverte, et elle ne disait jamais non quand il s’agissait de rendre service. Ils lui faisaient confiance. Nous faisions toujours notre arbre de Noel dans le hall d’entrée de l’immeuble. Plus tard, après notre départ, quand elle croisera les locataires ou les propriétaires ils lui disaient toujours « comme on vous regrette… ». Et elle aussi ça lui manquait.
De mon côté j’ai eu la chance de rencontrer des personnes formidables, qui ont partagé beaucoup de choses avec moi. Je me souviens de l’hôtesse de l’air du 5ème étage qui s’était occupé de moi quand ma mère a accouché, qui m’a emmené en vacances dans sa maison de campagne et me faisait partager sa passion pour les voyages et surtout le Japon. Mais il y a surtout eu Jeanne. Jeanne était ma 3ème grand-mère, elle n’avait pas d’enfants ou de petits-enfants, et elle aimait raconter, partager ses passions, transmettre. Elle m’emmenait au musée, voir des expositions, au cinéma, au salon de thé… me parlait énormément de tout ce qu’elle avait vécu pendant la guerre, la libération, ses souvenirs avec ses parents. Elle faisait partie de la famille, je me souviens de sa présence à mes anniversaires, ses encouragements, sa bienveillance. Mes grands-parents vivaient au Portugal, je les voyais peu, mais j’ai eu la chance d’avoir cette relation privilégiée avec Jeanne. Plus tard, j’ai étudié l’histoire de l’art et travaillé dans le tourisme, sans me rendre compte sur le moment de la marque que ces 2 femmes ont laissé en moi.
Ce sont des années heureuses, insouciantes… Je jouais dans la rue avec les autres enfants du quartier. Tout le monde se connaissait, discutait… partageait ses bonheurs et ses tracas. Finalement, je suis un peu comme ma mère… je suis nostalgique de ce temps-là.
Sylvie Leao
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