Comment un gamin de 14 ans affronte-t-il la mort prochaine, et redoutée, de son grand-père ? Pour son premier film après de nombreux courts-métrages primés dans les festivals, Joâo Salaviza, réalisateur portugais de 32 ans, ne choisit pas la facilité. Tout en évoquant la dilatation de l’espace et du temps (entre les derniers jours et le décès du malade) vécue par le garçon un été à Lisbonne, le jeune cinéaste suggère, par les partis-pris de cadrage et le refus du sentimentalisme, la solitude et la détresse adolescente dans une société en mal de repères. « Montanha, un adolescent à Lisbonne » met au jour les bouleversements intimes engendrés par la disparition imminente d’un proche, tout en se tenant au plus près des épreuves traversées par son jeune héros. Au-delà de l’expérience individuelle de son personnage, le talentueux Joâo Salaviza nous rend perceptibles le désarroi profond, et les ressources intimes, d’une génération en perdition, dans un pays d’Europe en grande difficulté, le Portugal.
Isolement silencieux, déni de la mort
Allongé sur le flanc, le dos nu dans la pénombre d’une chambre aux rideaux tirés, un garçon saisi dans son sommeil par une caméra attentive en un plan prolongé, dans la moiteur d’un matin paresseux. L‘injonction à se lever formulée par la mère, venue s’étendre à ses côtés, provoque un léger déplacement du corps et un mutisme durable. Quelques plans plus tard, l’enjeu se précise. Le grand-père de David va mourir mais l’enfant ne veut pas le voir, dans tous les sens du terme. Lorsqu’il accompagne sa mère, et sa petite sœur, dans l’établissement de soins où le malade est hospitalisé, il reste à la porte de la chambre et prend la ‘tangente’ dès qu’il le peut.
Nous comprenons assez vite que l’adolescent subit aussi les conséquences de l’éclatement de sa famille. Les parents, séparés depuis un certain temps, s’évitent systématiquement. Le père, venu dans l’appartement en l’absence de son ex-femme qui passe ses nuits auprès du mourant, s’autorise à questionner son fils sur la présence éventuelle d’un nouveau compagnon auprès de sa mère. Dans la semi-obscurité de la salle à manger où il ne veut pas partager le poulet rôti apporté, David repousse les marques d’affection d’un homme qu’il appelle par son prénom tout en refusant de répondre à son interrogation. Instinctivement, il sauve sans peau en laissant les adultes entre eux, les parents à leurs histoires de couple désuni, le père à sa défaillance, et le grand-père à sa fin prochaine. Café Pédagogique
« Montanha» un adolescent à Lisbonne , film de Joâo Salaviza-sortie mercredi 4 mai 2016
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