Pourquoi cette dimension est-elle exacerbée au village ? C’est un petit milieu, tout le monde se contrôle... On est d’accord, c’est plus facile de se faire repérer et d’être l’objet d’attention.
Mais tout dépend comment ce contrôle s’opère et quelles fins il obtient. Lorsqu’il s’agit en fin de compte de réduire toute initiative personnelle dynamique, cela s’appelle du nivellement par le bas.
Le problème est réel : absence d’initiative et de création d’activité, alors qu’il y a réellement de quoi faire et sans trop de moyens à investir. Mais l’esprit d’inertie ambiant qui règne frise l’indignation !
«Quem ve um povo, ve o mundo todo»
Il existe à la fois un manque de reconnaissance, une estime de soi très faible et un orgueil, une fierté souvent mal placée... Les apparences, ça compte beaucoup ici.... Comme un peu partout au Portugal. On peut dire que ça compte beaucoup trop. Mais quel est cet attachement primordial à ce genre de valeur ? Eux qui vont à la messe, apprennent à ne pas se fier aux apparences et à aimer la pauvreté ?!
Bizarre... Drôle de malentendu...
Le retour au village s’accompagne toujours d’une horde de questions.
Revenir au village, c’est se confronter de plein fouet aux réflexes primitifs, je veux dire premiers, encrés en tout être. C’est vrai, il y a les histoires particulières locales... Mais elles sont à l’exemple des passions humaines.
Chroniques du village
Je reviens au village. Il est rempli de tous ceux qui sont restés. Ceux qui ont continués avec le labeur de la terre, cette terre du Tras-os-Montes, déjà immensément dépeuplée avant l’hémorragie fatale commencée dans les années 60.
Ils sont là ceux qui ont poursuivis avec la culture héritée et les terres à cultiver. On ne leur rend pas souvent hommage. Parfois certains sont restés par faiblesse, une sorte de difficulté à s’adapter au dehors, une sensibilité... D’autres ne sont pas partis par conviction, un attachement certain à leur circonstance. Pauvres ou riches, tout le monde lutte. Il y beaucoup à faire. Mais c’est un peu tête bêche que tout le monde s’affaire... Un peu dispersés, pour ne pas dire mal organisés dans leurs tâches quotidiennes, ils souffrent leur sort en s’exécutant au labeur.
Les passions actuelles des Hommes s’enracinent dans les passions anciennes. On les dit «ancestrales», elles se perpétuent sous des modes différents, mais elles existent, elles prennent forme en des prétextes singuliers. Souvent il est question d’Amour, à travers les injustices affectives, la non-reconnaissance, la différentiation, l’humiliation, la mal-traitance... Les histoire d’antan ressurgissent dans les conflits actuels à travers la manière dont ils expriment leurs émotions. Les violences passées resurgissent...
C’est une terre de Juifs depuis plus longtemps qu’on ne l’imagine car on pense toujours à 1492, année de l’expulsion des Juifs d’Espagne, ils se sont en partie réfugiés au Portugal. Mais ces Juifs Espagnols ont rejoint des Juifs Portugais, déjà présents dans bien des lieux au Portugal (Les Juifs Portugais).
Cada roca tem seu fuso, cada terra tem seu uso
La difficulté d’accès dans le Tras-os-Montes rendait cette région difficilement pénétrable. Elle a été idéale, de tout temps, pour se cacher. La présence des Maures est également attestée, leur présence réelle et fantasmagorique aussi. Ils ont laissé une emprunte puissante dans l’imaginaire collectif, de nombreuses légendes en sont la preuve. Ils sont souvent été assimilés au diable, au mal, à la tentation...
Terre de conflits violents voire passionnels, terre de syncrétisme culturel... Non loin de mon village se trouve un autre village qui s’appelle Ala, le saint patron du mien est São Mamede et notre chapelle préférée, celle qui a une place bien singulière dans le coeur de tout Agrochanés qui se respecte : Nossa Senhora do Areal, anciennement Nossa Senhora das Arenas, parce qu’elle aurait été trouvée dans le sable présent dans notre rivière, cette vierge serait maure, elle est c’est vrai très brune, avec un ovale un peu spécial, une esthétique différente...
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